Entretien avec Alexandre Bavard (Mosa) lors de son exposition “BAD EMS” chez Romero Paprocki

Plongez dans l’univers d’Alexandre Bavard, issu de la culture du graffiti, ses projets sont à appréhender comme un travail de restitution de ces années à explorer les territoires et à pénétrer un présent promis aux mutations. Ces expositions recréent l’atmosphère de ces zones de no man’s land qui ceinturent les villes.


Pouvez-vous nous parler de votre parcours artistique et de la manière dont vous êtes entré dans le monde de l’art ?

Vers 13-14 ans, j'ai commencé à taguer et ça m'a amené sur un chemin artistique. À la suite de la découverte du tag, j'ai commencé à avoir des crews dont PAL avec des amis avec lesquels j'arpentais les rues de Paris pour taguer et marquer mon nom.

Le tag est lié à l'univers urbain. C'est pour cela que mon travail a une connotation urbaine. Par la suite j'ai fait l'école Boulle et les Beaux-Arts de Lyon donc j'ai eu un cursus parallèle.

Je me considère comme un tagueur ce qui n'a ri en à voir avec un street artist, je mets en avant la signature, le vandalisme, l’aspect  illégal est important dans cette pratique-là et fais son essence.

Quels sont vos principales inspirations artistiques et comment elles se manifestent dans votre travail ?

Je suis un artiste à 360 degrés. J’utilise la vidéo, la performance, le tag,  la peinture, la sculpture, j'ai une pratique qui est assez libre. Etre artiste c'est être libre. Au gré des voyages, des rencontres, des endroits, je suis amené à créer de manière différente dans les lieux où je m'inspire énormément. C'est pour cela que je suis très attaché au format de résidence qui me permet de renouveler mon Art.

A la suite de ça, dans les lieux où je vais être, je vais pouvoir m'influencer de l'architecture, des gens, de l’histoire. Mon processus créatif est très adapté à la localité, aux situations où je me trouve.

Quels matériaux et techniques préférez-vous utiliser dans votre art, et pourquoi avez-vous choisi ces éléments spécifiques ? 

Par exemple, les matériaux que j'ai utilisés pour l'exposition « BAD EMS » sont essentiellement de la résine, du plâtre et de la mousse expansive. La mousse expansive est un matériau de construction qu'on trouve à peu près partout.

En fait, elle a été utilisée parce que je cherchais quelque chose de léger,  qui soit très rapide à utiliser et qui ressemble en fait à la bombe de spray. Il y a beaucoup de similitudes sur ce tracé, sur cette manière d'utiliser la bombe et donc c'était pour moi un lien évident.

Je voulais vraiment créer des masques qui seraient en fait portés pendant une performance et donc chercher quelque chose de léger à porter sur le visage des danseurs. Ce côté très brut de la mousse expansive me plaît et en même temps il y a une sorte de candeur avec les couleurs qui lui ramène une forme de légèreté, un côté un peu « Eye candy ».

Votre travail semble souvent incorporer des éléments narratifs. Y a-t-il un message ou une histoire que vous cherchez à transmettre à travers vos créations?

Effectivement, j'aime créer des univers et surtout m'influencer de récits.

En l'occurrence pour « BAD EMS », de mythologie d'oeuvres dramaturgiques comme celle de Sophocles avec Antigone. Une histoire immuable, universelle avec des thématiques comme la justice, la mort, la vie, l’injustice, la démocratie, la loyauté. Des thématiques qui sont toujours d'actualité et universelle. Pour l'exposition « BAD EMS », c’est la suite de mes recherches autour de la démocratie et de la justice, que j'avais réalisé dans l'exposition « BRAV » à la galerie Tick Tack à Anvers. Une exposition autour du mouvement des gilets jaunes. J'ai creuser sur ces notions autour de la démocratie, et il s'avère que le monde antique, et plus spécialement la Grèce, en est la racine.

C’était quelque chose de très important d'aller chercher les racines de nos démocraties et d'en faire un lien avec une actualité, en tant que citoyen français. Je me suis donc rendu en Grèce, à Athènes, pour aller chercher du matériel, pour aller visiter des musées, pour ramener du materiel, et travailler ici à Paris. Le voyage est très important. L’artiste est aussi un chercheur, un enquêteur, un archéologue, il doit se déplacer pour aller rencontrer les gens, les lieux, pour pouvoir être inspiré et c’est une des choses les plus importantes.

 Comment la culture et l'environnement qui vous entourent influencent-ils votre art ?

Mon travail s’ancre dans un rapport historique et se confronte avec notre monde contemporain. Il y a souvent des allusions à l'histoire, à l'archéologie, à la recherche documentaire, se transfère sur notre monde contemporain, sur ce que je ressens en 2024.

En tant que parisien je suis influencé par la culture urbaine de ma ville. Son stress, sa mixité social, son architecture, son histoire. J’essaye donc de mixer, ces différentes époques, différents temps, de les remixer pour pouvoir me créer ma fiction urbaine. C'est dans cette fiction-là, que je viens créer, que je crée ma cosmogonie où je viens créer des personnages influencés aussi de la science-fiction des années 70, 80, 90.

Je suis né en 1987 donc toutes les années 90 ont été énormément de choses auxquelles je me référence que ce soit aussi bien dans les dans les animés Akira de Otomo ou bien de la série de films  Terminators. Les oeuvres présentant des mondes dystopique, ressortent très fortement dans mon travail. 

Avez-vous des projets ou des collaborations futurs qui vous passionnent particulièrement et que vous aimeriez partager avec votre public ? 

Pour parler des projets futur: je reviens du musée Mittelrein à Koblenz où j'ai fait une installation pour une exposition collective ainsi que des oeuvres qui ont été présentées dans la collection permanente avec des reliques de différentes époques. Ca a été très important pour moi de pouvoir intégrer une collection permanente pour montrer mes oeuvres. Je travaille de plus en plus en musée, c'est quelque chose qui me réjouit parce que pour moi c'est là où mon travail peut avoir le plus de sens et de rayonnement. 

En avril, je part à Bonifacio, je participe à la seconde édition de la  Biennale Corse organisé par Dereneva. La thématique de cette seconde édition est la chute des Empires. Thématique parfaite et dans une suite logique de création, d'esthétique et de pensée. Leur invitation me touche énormément et je suis impatient de me rendre sur place pour créer spécialement les oeuvres. 

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